LES 4 PREMIERS GAGNANTS :
Premier : Paul Allegraud avec
VACHERIES CAMPAGNARDES
Antonin
Chapelle, le maire de Saint-Vacherin, malgré ses airs de poussah
débonnaire, ou plutôt de "poussin", ce jour-là,
vu qu’il était tout de jaune vêtu, chemise, veste, pantalon
et chaussettes compris, n’avait rien de l’honnête citoyen qu’il
prétendait être. Des casseroles, il en trimballait pas mal,
et de toutes tailles. Qu’importe, Antonin Chapelle s’y entendait
pour mettre les gens dans sa poche et régnait en maître absolu sur
le destin de cette petite bourgade.
Ce
fameux dimanche, jour de la tragédie, en sortant de la messe,
Antonin Chapelle, fidèle à ses habitudes, traînait sur le parvis
de l’église, distribuant poignées de main et bons mots à
l’habituel attroupement de courtisans obséquieux et quelques
bonbons à leurs gamins qu’il voyait déjà comme de futurs
électeurs dociles. S’il n’avait pas été aussi imbu de sa
personne, aussi sûr de sa toute-puissance, peut-être aurait-il
remarqué Philibert Darencoin, juché sur son tracteur, qui le
regardait d’un œil noir.
Philibert
Darencoin faisait partie de la quinzaine d’agriculteurs qu’il
avait expropriés en échange d’une poignée de cacahuètes, afin
que naisse le grand parc d’attractions qui devait faire de ce
village la plus riche commune du département. Malgré les promesses
du maire de leur allouer de nouvelles terres, les paysans étaient
aujourd’hui quasiment S.D.F. et la révolte grondait dans leurs
rangs. Ce jour-là, ils avaient décidé de frapper un grand coup.
Lorsque
Antonin Chapelle posa son imposant postérieur sur le cuir crème de
sa belle 504 décapotable blanche, il ne vit pas non plus Philibert
agiter à grands gestes une lampe au verre teinté de
bleu… L’eût-il vu, aurait-il compris qu’un horrible piège
était en train de se refermer sur lui ?
Chaque
dimanche, Antonin Chapelle envoyait femme et enfants partager le
repas dominical en famille tandis que, nonobstant toute honte, il
fonçait à l’hôtel de la Plage, dans le village voisin,
rejoindre Euphrasine Lembompoint, pharmacienne de son état et
exigeante maîtresse. Savourant par avance les délicats plaisirs
qu’il se promettait, il fut à peine agacé qu’un engin agricole
en panne au milieu de la route l’oblige à faire un détour par le
chemin des Escargotiers, petite voie étroite, mais heureusement peu
fréquentée. Bien sûr, la présence de Gaëtan Guilmorin, garé sur
le bas-côté, un tombereau accroché derrière son tracteur,
l’étonna un peu, mais beaucoup moins que celle de Félicien
Patureau dont la bétaillère arrêtée sur la chaussée interdisait
tout passage.
De
caractère plutôt sanguin, Antonin Chapelle s’apprêtait à donner
de la voix quand il entendit derrière lui le bruit d’un attelage
en manœuvre. Le tombereau, guidé d’une main de maître,
s’ajustait parfaitement en hauteur et en largeur à la malle
arrière de la Peugeot. Avant même que l’engin commence à
basculer sa cargaison sur l’intérieur grand luxe de la 504, le
maire reconnu à l’odeur ce dans quoi il allait bientôt baigné :
du purin d’orties…
Paul Allegraud
Second : ex aequoLa Galinette de Mathieu de Béatrice Riot et Lila de Brigitte Charnier
LA GALINETTE DE MATHIEU
Aux
yeux de sa drôlesse d’épouse, Mathieu n’était qu’un
pedzouille, un cul-terreux de paysan, un clampin juste capable de
cultiver des navets, des patates et des cornichons. Pauvre de lui !
Il traînait derrière lui une satanée casserole !
Pourtant, Il y a deux ans, il avait cru accomplir une bonne affaire
en s’unissant à Galina, par les liens sacrés du mariage. Avec un
nom pareil elle aurait pu le seconder et régner sur sa basse-cour,
son potager et sa ferme comme une maîtresse femme. Puisque le prénom
Galina en russe signifiait poule en français, il avait pensé bien
naïvement qu’elle serait sa poule aux œufs d’or. Pour sûr !
Sa galinette était tellement resplendissante ! N’avait-elle
pas joué les starlettes sur la plage de Saint-Tropez ?
Il avait été si fier de la présenter à son entourage, puis de
l’avoir à son bras à l’église. Tel était pris qui
croyait prendre ! Il aurait mieux valu qu’il se marie avec
Mauricette, son ex-fiancée. Hélas, elle n’était pas aussi
attirante ! Avec ses traits hommasses et sa silhouette trapue,
elle n’avait pas fait long feu dans le cœur de Mathieu. Son
physique ingrat ne l’avait guère avantagée et elle avait été
vite éconduite. En attendant, il aurait dû se méfier de cette
trop belle donzelle au regard de braise qui l’avait bel et bien
envoûté. Il avait été piégé comme un rat ! Car en vérité,
ce n’était qu’une gourgandine de la pire espèce qui passait son
temps à se pomponner, pendant que lui, dès potron-minet, s’échinait
sur son tracteur. Elle ne se cassait pas non plus la nénette
pour tenir les rênes de la maison, même si c’était elle qui
portait le pantalon ! Diantre ! Ce n’était plus
un poil dans la main qu’elle avait, mais un séquoia !!! Son
seul talent était de raconter des carabistouilles à longueur de
journée, pour se rendre intéressante. Et elle savait joindre le
geste à la parole, la péronnelle ! Elle en brassait
du vent à tout berzingue ! Saperlipopette, elle en faisait des
momeries et des minauderies ! Et pour comble de bonheur, cette
sainte-nitouche avait toujours un pet de travers ! Une
valétudinaire patentée qui se languissait de moult maux
imaginaires. Par-dessus le marché, elle l’avait affublé d’un
vilain sobriquet en le traitant de « fesse-mathieu ».
Scrogneugneu ! Si ce n’était pas malheureux ! Lui,
pingre ? Macache ! Lui, qui venait de lui offrir une
ancienne lampe Berger en cristal de Baccarat qui lui avait
coûté bonbon ! Elle ne manquait pas d’air ! Il
ne fallait tout de même pas pousser « pépé » dans les
orties ! Il en avait plus qu’assez de son air
hypocrite et goguenard. Il en avait ras la casquette de ses oripeaux
inutiles, de ses fanfreluches affriolantes, de ses colifichets et
tout le saint-frusquin ! Il n’éprouvait plus rien pour cette
greluche provocante qui se prélassait au lit et l’accablait de
reproches incessants, de propos infamants et de critiques infondées.
Il était devenu le parfait bouc-émissaire de Madame. Et il était
comme une poule qui n’avait qu’un poussin… Il se faisait
un sang d’encre. Lui, si zen auparavant, n’était plus qu’un
paquet de nerfs angoissé et tourmenté. Il avait de quoi se faire
du mouron ! Même leur chat Calisson, à la fois câlin et
polisson, avait fini par la prendre en grippe ! Aussitôt
qu’elle apparaissait dans son champ de vision, le petit félin
s’enfuyait à toutes pattes. Il se souvenait certainement qu’elle
avait failli l’empoisonner avec du poisson avarié, l’an passé.
Mathieu n’avait plus qu’une obsession, trouver un moyen pour se
débarrasser de cette encombrante «belle-en-cuisse» …
Béatrice Riot
*****************
LILA
LILA
Lila
rêvait au-dessus de l’évier. La casserole encore remplie
des saveurs de midi. Lila
rêvait
toujours quand elle plongeait ses mains dans la vaisselle. L’eau
tiède se transformait en
plage
marine où les bulles du liquide vaisselle s’envolaient
nouveaux goélands surfant sur un lit
de
lumière.
Lila
rêvait, Lila frottait. Elle frottait et dans ses yeux flottaient des
embruns de silence,
des
écumes aromatiques, la brise des plantes sauvages qui lui venaient
d’un lointain orient.
L’orient
que sa grand-mère, partie avec les goélands, lui inventait. Un
orient de brume qui
s’échappait
des lèvres de sa grand-mère, un orient où les temples bouddhistes
devenaient des
églises
étonnantes comme des chapiteaux, où les moines, sabre au poing,
virevoltaient dans leur
robe
de feu séduisant les rêves de Lila.
Lila
frottait. Un tintement. La voilà affrontant les marches du
temple-église. Aucune
lampe
pour accompagner sa lente montée, mais des lampions, des arcs en
ciel de bougies et la
mélodie
des moulins à prière.
Lila
frottait. Des piaillements. Les singes venaient jouer sur ses
épaules, tiraient ses
cheveux.
Elle sortit de sa poche les derniers bonbons qui lui
restaient, ceux qu'elle avait achetés
la
veille au marché du village. Les jeta loin d'elle. Les singes
l'abandonnèrent. Elle arriva au
sommet
de l'escalier. Pénétra dans le temple-église, éblouie par la
grandeur des statues colorées.
Toute
une palette de peinture se révélait à ses yeux, des ocres, des
jaunes poussin, des rouges
vermillons,
des verts printemps, du noir. Et ces visages grimaçants. Ces
postures improbables.
Lila
s'en retourna, après une longue contemplation, sur les lèvres le
mantra Oṃ maṇi
padme
hūṃ. Redescendit les marches, le regard vers les collines qui
protégeaient les
monastères.
Hantée par la musique des moines, elle avançait sans se soucier de
la végétation
envahissant
les sentiers. Elle ne prit pas garde aux orties qui
transperçaient son pantalon. La
végétation
lui sembla soudainement hostile. Les oiseaux hurlaient à ses
oreilles. La pluie se mit
à
tomber sombre, violente. Ses yeux s'embrumaient de gouttes tièdes.
Ses mains sentaient l'eau
moite
dégoulinant sur ses doigts. Le bruit d'un tracteur envahit
l'atmosphère. Lila regarda
autour
d'elle. Où était passée la végétation ? Où se nichaient les
oiseaux hurleurs ?
Dehors,
un ciel lacté sur les champs de maïs. Dans sa cuisine, murmurant le
mantra,
Lila,
de ses mains gercées par la vaisselle répétitive du midi, venait
de réinventer le geste
d’Aladin.
Brigitte Charnier
Troisième place pour Jacqueline Souza-Conti
(sans titre)
Elle lui intime de rester à la maison,
Ordre qu’il repousse d’un si vilain geste,
La traitant de poison, d’emmerdeuse, de peste
Et qu’elle cesse de toujours lui casser les bonbons.
Puis enfourchant sa vieille bicyclette
Il s’en va au bistrot retrouver ses copains.
Toute la journée à la tâche sur son tracteur
Lui donne bien le droit de s’amuser «queque z’ heures»
Bien avant que l’aiguille après tant de passages
N’ait rayé le sillon gravé sur sa plage.
«Ah ça ira … les aristocrates à la lanterne»
Il revient chez lui, pieds nus dans la luzerne.
La route a disparu, « Ben où qu’elle est à c’theure » ?
Quand soudain il voit, le clocher éclairé de l’église.
Qui tel un torrent impétueux, déchaîné jaillit
Inondant de haut en bas son pantalon du dimanche.
Il ôta son falzar, tout comme lui, fortement imbibé
Et suivit sa route, parmi les herbes folles, nu comme un ver.
Et vlan, coup du destin, un fossé mal intentionné, se place sur sa route
Il glisse, plusieurs roulés-boulés et atterrit sur les orties urticantes.
Jacqueline Souza-Conti
Quatrième place pour Cécile Ramaekers
Elle lui intime de rester à la maison,
Ordre qu’il repousse d’un si vilain geste,
La traitant de poison, d’emmerdeuse, de peste
Et qu’elle cesse de toujours lui casser les bonbons.
Donc, il part muni de sa lampe tempête
Enfile à la hâte sa veste jaune-poussinPuis enfourchant sa vieille bicyclette
Il s’en va au bistrot retrouver ses copains.
Tout en sifflotant il quitte sa rombière
Déjà tout au plaisir d’avaler quelques bières.Toute la journée à la tâche sur son tracteur
Lui donne bien le droit de s’amuser «queque z’ heures»
Elle mettra le disque de leur crooner favori
Qui fut un temps leur chanson à elle et son mariBien avant que l’aiguille après tant de passages
N’ait rayé le sillon gravé sur sa plage.
Scandant à tue-tête de sa voix de casserole
Son refrain habituel de la carmagnole«Ah ça ira … les aristocrates à la lanterne»
Il revient chez lui, pieds nus dans la luzerne.
La nuit est noire, tout autant que notre noceur
Plus de lampe, de bottes, pas même de chemiseLa route a disparu, « Ben où qu’elle est à c’theure » ?
Quand soudain il voit, le clocher éclairé de l’église.
Dans la joie de se retrouver enfin, il saute, se déhanche
Et ne peut retenir le trop-plein de sa vessieQui tel un torrent impétueux, déchaîné jaillit
Inondant de haut en bas son pantalon du dimanche.
Ah ! Ah ! Vous vous dites où va-t-elle pouvoir
insérer
Le dernier mot. Alors voici la fin. Après sa fuite …urinaire,Il ôta son falzar, tout comme lui, fortement imbibé
Et suivit sa route, parmi les herbes folles, nu comme un ver.
Tout droit, se
disait-il, les yeux braqués sur la
lumière mouvante
Doux euphémisme ! Elle semble si près, mais parfois si loin, sans doute.Et vlan, coup du destin, un fossé mal intentionné, se place sur sa route
Il glisse, plusieurs roulés-boulés et atterrit sur les orties urticantes.
Jacqueline Souza-Conti
La soupe aux bonbons
LA SOUPE AUX BONBONS
Dans
une grande casserole, faites cuire à feu doux
une poignée d'orties mélangée à deux tasses
d'eau. Pour couper le piquant des feuilles, ajoutez-y un petit cube
de bonbon sucré. Mélangez le tout, jusqu'à ce
que le cube soit entièrement dissout, puis portez à ébullition
durant deux minutes soixante-cinq.
Coupez
le feu, puis laissez reposer à température ambiante jusqu'au
prochain son de cloche de l'église de votre
village.
Jusque
là, tout me paraissait simple, même si j'avais un doute sur le
temps de repos car chez moi, à trois cents quatre-vingt deux mètres
de la plage et sous dix-huit mètres virgule quatre d'eau de
mer amer, il m'est impossible d'entendre les cloches sonner.
D'un
geste méthodique, j'allumai ma lampe informatique et
parti sur le net à la recherche d'une autre façon de faire cette
recette. Cette entrée sucrée-salée, je ne pouvais pas la rater !
C'était le plat préféré de mon poussin qui devrait venir,
tout à l'heure, peu avant le coucher du dauphin.
Pour
ne pas changer, ma connexion avait des « ratés », et
j’eus le temps de voir deux tracteurs passer avant que ma
page soit enfin chargée ! Pfff ! Je vous jure, aucun geek
ne survivrait à une connexion pareille, sauf peut-être les Ouiphy,
cette espèce de serpent électrique qui vit dans les fonds profonds
et qui grappille le moindre courant marin.
Enfin,
bref, sur les 5 résultats que me donna Internet, quatre avaient des
temps de repos qu'il m'était impossible à respecter. Pour l'un, je
devais attendre le passage d'un banc de poissons plumes (dans la mer
amer, je vous mets au défi d'en trouver ne fut-ce qu'un seul !),
pour un autre je devais simplement photographier la prochaine lune
rouge qui, si ma mémoire est bonne, n'est pas avant une dizaine
d'années, pour un autre encore, il me suffisait d'éplucher un
pantalon cornichon (en plein septembre, ce n'est plus la
saison voyons) et enfin pour le dernier, je devais écrire le mot
« belouette »
en
franssère, puis en anglair et
enfin de travers… Moi qui suis uniglotte, c'est mission impossible.
Il me restait donc une seule façon de faire, je n'avais pas le
choix, je n'avais plus que cette possibilité : « Laisser
reposer jusqu'à ce que votre invité arrive. Servez dans un bol
profond, agrémentez de quelques grains de confettis et … bon
appétit ».
Cécile Ramaekers
ENSUITE : (A noter que les textes suivants ne sont pas mis dans un ordre de gagnants mais par ordre alphabétiques de prénoms.
Angelina :
Le petit poussin et sa soupe d’orties
Il
était une fois un petit poussin qui portait un pantalon, sur
lequel on pouvait voir le dessin d’une église.
Il
adorait le bonbon au caramel de son arrière-arrière-grand-mère qui avait
282 ans, mais il ne mangeait pas car il le gardait dans la poche de son
pantalon en souvenir d'elle car il ne la voyait pas beaucoup.
Un
jour, il alla chercher son tracteur pour aller à la plage arracher les orties. Comme il faisait
noir, le petit poussin prit sa lampe torche et fit de grands gestes
avec pour éclairer les végétaux qu’il devait arracher. Il arracha ainsi les
orties une par une. De retour chez lui, il les mit dans sa casserole
pour en faire une soupe d’orties.
Il prit la recette de
son arrière-arrière-grand-mère et lu :
Ingrédients :
4 bouillons de
cloportes
1 kg d'orties
2 oignions
2 poignées de pistaches
1 creux de patte de sel
1 soupçon de poivre
2 poivrons verts piquants
6 carottes
1 patate
2 litres d'eau
25 cl de grenadine
Une marmite de sorcière pour une cuisson automatique
Il fit 6 fois le tour de
sa cuisine pour trouver les ingrédients. Malheureusement, il ne trouva pas de
poivrons, alors il mit le bonbon au caramel pour remplacer cet ingrédient
manquant. Il se rendit compte alors que sa soupe devenait orange flash, et
qu'elle avait un délicieux goût sucré !
Fier de sa découverte,
il alla trouver son voisin l'âne pour lui demander de le conduire chez son
arrière-arrière-grand-mère qui habitait à des kilomètres de chez lui. Le
poussin voulait vraiment lui faire goûter sa nouvelle soupe.
Après plusieurs heures
de longue marche, ils arrivèrent enfin chez la vieille cane. Celle-ci était
tellement heureuse de la visite surprise de son petit poussin, qu'ils firent
une fête pour cette soupe qui dura jusqu'à minuit !
Angélina
(11 ans)
Axelle Yelma
Vie urbaine et rurale
L’air
est pollué par l’industrie, en ville. Les citadins sont réticents ; ils
vont vite, s’activent et n’ont le temps. A
Lausanne, par exemple, l’architecture
est moderne. Les maisons sont si bien disposées qu’on se retrouve
facilement : à droite les immeubles en numéros pairs et à gauche ceux en
numéros impairs. Les bus passent toutes les cinq minutes. Il ne faut pas être
en retard d’une minute. En suisse on est ponctuel, ce n’est pas cruel !
Les moments de distraction se déroulent bien souvent dans les lieux
publics :
A Ouchy, Sur la plage saturée de vacanciers,
Une jeune
femme lisant un roman policier
Est
allongée sur une natte.
Posée,
reposée, elle parcourt son roman sans
hâte.
Un passant
malin l’asperge de sable sur le visage.
Folle de
rage,
Elle se
défoule verbalement.
Après avoir
retrouvé sa sérénité, elle va à l’eau lentement.
Plus
loin à droite, une petite fille capricieuse de sept ans réclame un bonbon
à sa mère en trépignant. Irritée, celle-ci l’empoigne et lui demande de se
calmer.
L’atmosphère
est si édénique, les paysans si sympathiques et généreux, en campagne. Monsieur
Edouard Chapuis, un paysan de Cugy, aime cultiver la terre et élever des poussins.
Sa compagne Martine, influencée, lui prête main-forte. Seulement elle
appréhende souvent le contact avec les orties.
Monsieur Chapuis se revêt d’un pantalon
particulier et se sert d’un tracteur pour labourer la terre. C’est
un bourreau de travail. Il est capable de labeur jusqu’à tard dans la nuit.
Dans ces cas-là, il se sert d’une lampe torche
pour s’éclairer. Les casseroles
usées de sa défunte mère lui servent de récipients pour nourrir sa volaille.
Tous les dimanches à neuf heures du matin, le son
tonitruant de la cloche de l’église évangélique située à quelques pas de
chez lui résonne. Martine trouve agaçant. Une voisine de Monsieur Chapuis,
Madame Ricardo, âgée de quatre-vingt ans est une fervente croyante. Elle fait
un geste de la main lorsqu’elle passe devant chez lui, à chaque fois qu’elle se rend au
culte.
Il est
agréable de vivre en campagne, mais financièrement capital d’être en ville.
Axelle Yelma
***************
Charlotte Coudray
Au détour
d’un chemin.
Ce jour-là,
je marchais dans l’un de ces chemins creux bordé par de vieux chênes têtards.
Mon attention fut attirée par une poule et ses
poussins qui apeurés par ma venue s’enfuirent dans des orties au pied d’un vieux chêne. Amusée, je
poussais les orties du pied et c’est alors que je vis un
pantalon séchant au vent, un tracteur
abandonné sur une place. Je crus deviner
dans une maisonnée, la lueur d’une lampe et
le bruit des casseroles. Sur une plage de sable fin, des
bonbons avaient été oubliés. Les cloches d’une
église sonnèrent au loin me tirant de mon observation, me redressant je tournai la tête. C’est là
que je les aperçus, ils se cachaient mais étaient bien présents. Alors pour les
rassurer, d’un geste je rabattis les orties
et continua ma flânerie, heureuse. Maintenant, je savais…
Charlotte
Coudray
Les Pays
d’Elfirie
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Christian Galiana
L’œuvre
Comme tous les matins de bonne heure, François
nettoyait la plage avec son tracteur avant l'arrivée des
touristes. Comme chaque jour, de nouvelles surprises l'attendaient et comme
chaque jour, il pourrait terminer son nettoyage par un geste pour la culture en continuant cette sculpture surréaliste
qu'il avait commencée dès le début de la saison, là-bas au bout de la plage,
juste en dessous de la petite église
qui faisait face à l'océan.
Un échafaudage étonnant de ses trouvailles de
l'été : des chaussures, des parasols multicolores, des chapeaux de paille, deux
planches de surf brisées, des sous-vêtements de toutes les tailles, des fleurs
en matière plastique, le tout artistiquement disposé, et même une vieille
carcasse de vélo qu'il avait installée au sommet de cet empilage qui devenait
une œuvre psychédélique et surtout un détour obligé pour les touristes toujours
avides d'étrangeté.
Aujourd'hui, le méli-mélo de François
s'enrichirait d'une casserole qu'il allait fixer à la
proue de ce navire incertain, juste en dessous de la lampe tempête qu'il venait allumer chaque soir, car son œuvre
se visitait aussi à la tombée de la nuit, quand les promeneurs et les
infatigables photographes venaient contempler et immortaliser cet amalgame
incongru mais finalement très onirique qui les réjouissait comme un bonbon insolite au soleil couchant.
Pour chevaucher l'ensemble, il avait conçu avec
les débris ramassés sur la plage une sorte d'épouvantail déguenillé, habillé
d'un vieux pull marin et d'un pantalon
non moins marin à pattes d'éléphant, rouge et aux larges revers, épouvantail
récemment affublé de deux paires de lunettes de soleil superposées et dont le
regard ainsi équipé semblait se perdre dans la ligne d'horizon.
Aussi étonnant qu'un poussin dans une friche industrielle, cet assemblage facteur
chevalesque finissait par faire l'orgueil de la commune qui ne souhaitait plus
– comme en début de saison – le jeter aux orties, mais qui envisageait plutôt d'en assurer maintenant la
promotion afin d'attirer les visiteurs pendant le reste de l'année.
La ministre de la Culture elle-même en avait été
informée et bien sûr des images de l'œuvre circulaient de plus en plus sur la
toile.
Encensé par la critique artistique, François
serait bientôt fait Chevalier des Arts et des Lettres et abandonnerait son
poste de nettoyeur de plage pour devenir conférencier, mais cela ne serait
hélas pas le meilleur de cette histoire…
Christian
GALIANA
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Christiane Genêt
Le bénitier aux bonbons
-Quand Marcel, le paysan de
Coze venait sur son tracteur rouge en pantalon bleu après le
travail, près du perron de l'église où il garait son beau tracteur sur
le parking des voitures pour acheter son journal au bureau de tabac et boire
son pastis coutumier au café de la place centrale, il avait un geste de
joie. Sa poitrine se détendait. Il retrouvait des souvenirs d'enfance, de bons
souvenirs où, accompagnant sa grand-mère à la messe du dimanche, il avait droit
de prendre un bonbon dans le bénitier réservé aux enfants.
-En effet, en ces temps là, il
existait des bonbons de toutes les couleurs, à tous les parfums, dans un des
bénitiers de l'église qui dormaient au frais sous la tendre lumière d'une
veilleuse qui servait de lampe dans le coin le plus sombre des lieux.
C'était là que se trouvait le bénitier dit des enfants.
-Ensuite, après la messe, en
revenant de l'église sa grand-mère lui demandait de l'aider à ramasser des orties
d'un vert bouteille en bordure de la plage au sable chaud. Pour les
cuire dans la casserole en fonte et obtenir une bonne soupe de santé
elle y ajoutait une cuillère à soupe d'huile d'olive. Elle la lui offrait
chaque dimanche, au retour de la messe, cette soupe d'orties cueillis ensemble
alors qu'il était encore assez naïf pour idéaliser ce moment de partage avec la
mère de sa mère. Le reste de la soupe était jetée dans la cour pour les petits poussins
tout jaune et duveteux de la ferme qui accouraient en tout sens en
piaillant.
-Quelle âge avait-il donc ?
Il se grattait la tête avec plaisir pendant qu'il savourait cette émouvante
évocation. Sa grand-mère qu'il appelait Mamou lui apprenait à être heureux avec
le peu qu'occupait son assiette du dimanche.
-Ensuite c'était une bonne
partie de crapette où à chaque fois sa grand-mère gagnait avec une telle joie
qu'il s'en réjouissait lui aussi pour elle, qu'elle gagne et que lui perde.
-Voilà le temps a passé.
Marcel a pris de l'âge et il ne mange plus d'orties en soupe. Il est heureux de
retrouver cette évocation d'un moment de bonheur devant le parvis de l'église
de son village de Coze.
Christiane Genêt
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Corinne Moreau
Aïe ! Je me cogne contre un truc en métal qui fait un bruit
de casserole en dégringolant, ma
petite sœur a encore laissé trainer des jouets partout ! Je viens en fait
de bousculer le tracteur de
Barbie !
Continuant en mesurant chacun de mes gestes, j’avance lentement dans le noir, il faut que je déniche une
lampe. Ça devrait être possible dans
tout ce bric à brac entassé par ma sœur pour jouer « comme une
grande ». J’en trouve enfin une, planquée au milieu des peluches, poussins, canards, et autres animaux
sont en train de barboter dans une fausse piscine et la lampe faisant office de
plongeoir ! Quel bazar, il y a même des papiers de bonbons, sans doute de la nourriture pour récompenser ces bestioles
après le plongeon.
Je sors de la maison, contourne l’église, prends le raccourci qui mène à la plage, zut, j’avais oublié qu’il y avait plein d’orties sur ce chemin ! Tant pis, j’avance rapidement, ça me
fouette les jambes, mais je ne sais pas si je vais à me rendormir après tout
ça !
Corinne Moreau
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Elisabeth Milbeau
Une journée en août
D'un geste vif, elle
allume la lampe au-dessus de la cuisinière.
Il faut qu’elle se hâte car enfants et petits-enfants vont débarquer de la plage, l’appétit aiguisé par le grand air.
Déjà une bonne odeur de sucs de viande, d’orange et
différentes épices, s’élève dans la
cuisine rustique. Les jarrets de veau mijotent dans le four. Dans la casserole, sur le gaz, aux oignons elle ajoute carottes, miel, cumin, bouillon
de poule. Déjà lavées et coupées en morceaux, pommes de terre, navets et
courgettes s’apprêtent à rejoindre les autres légumes. En souriant, elle pense
qu’elle aurait pu ajouter quelques orties,
celles justement qui la veille ont, perfidement, piqué le petit Rémy, deux ans.
Des bonbons avaient rapidement séché ses
pleurs et un peu de pommade calmé les démangeaisons.
Ce petit chéri est à l’âge innocent où l’on ne suspecte pas
le danger. La semaine dernière n’a-t-il pas échappé à la vigilance de sa
cousine et traversé le chemin qui mène à l’église car
il avait vu en face, dans l’enclos où quelques poules courent en liberté, une
couvée de petits poussins. Moins d’une
minute plus tard, un tracteur chargé de foin
arrivait. A ce souvenir, les battements de son cœur s’accélèrent.
Les légumes commencent à confire et elle baisse le gaz. Un
grand saladier de tomates du jardin, noires de Crimée, cornues des Andes, cœur
de bœufs attendent d’être savourées. De même, un grand compotier de fruits et un gâteau aux fraises qu’elle a confectionné la veille.
Maintenant, Il lui reste à mettre la table. Douze personnes !
C'est un peu de fatigue mais tellement de joie.
Ils sont venus, en ce début de juillet, profiter de la
fraîcheur de la côte normande, quittant sans regret les températures
exténuantes de la capitale
Il faut qu’elle se change avant leur retour. Elle remplace
son pantalon par une jolie jupe, rectifie
son maquillage, se recoiffe.
A peine a-t-elle le temps de s’asseoir, un livre à la main,
qu’un joyeux brouhaha monte de la rue.
Mamie ! Mamie !
Ça y est ! Nous sommes là ! Si tu savais ce qu’a encore fait
Elisabeth Milbeau
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Coucou ma Chantaloup
RépondreSupprimerJe vais me lancer !
J'ai une copinaute qui a la plume facile qui va y participer aussi.
Bisous et bon vendredi
Béa kimcat
Super !
SupprimerAllez-y les filles ! Je suis certaine que vous allez être au TOP :)
Bisous
Chantaloup
Bonjour,
RépondreSupprimerGrâce à Béa (Kimcat), je découvre votre site, association et concours... ouf tout ça à la fois hihi
J'ai déjà un premier texte, et c'est quand je relis le règlement (30taine de lignes) que je me dis "oups"... mais non, ça va, j'en suis à 26 ! Sans compter, sans tricher :) Bon, c'était mon premier texte un peu foufou, je vais voir si je peux en faire un autre un peu plus terre à terre.
Au fait béa, la copinaute, c'est moi ?
Amitiés à tous, et à bientôt
Cécile
Bonjour Cécile,
SupprimerJe suis heureuse de t'accueillir parmi nous. Je me souviens très bien du livre "faire pousser des oiseaux".
J'ai voulu le commander pour notre bibliothèque mais nous n'avons pas pu l'obtenir du moins par la librairie par laquelle nous sommes dans l'obligation de passer. Quel dommage. Je souhaitais vraiment le faire partager à tout les enfants !
Les textes un peu foufous sont les bienvenus ! Il y a bien assez de choses tristes dans cette vie.
J'attends tes textes avec impatience.
Amitiés Cécile et à bientôt,
Chantal
Oui Cécile la copinaute c'est toi !
SupprimerBisous
Coucou ma Chantaloup
RépondreSupprimerMon texte est fait ! Tous les mots sont casés. 35 lignes, ça ira ? Il est assez amusant et son titre est "La galinette de Mathieu".
Je te l'envoie bientôt !
Bisous.
Contente de savoir que nous allons pouvoir compter sur la jolie plume de Cécile.
Coucou ma Béa,
SupprimerIl n'y a pas de problème une trentaine de ligne ce n'est pas 30 pile ! Je me doute que ça doit être tout bon.
J'ai hâte de te lire ainsi que Cécile.
Bisous
Chantaloup